
6 dans l'au-delà : 6 choses à savoir sur Le poète Lutumba Simaro Masiya, l'un des artistes auteurs compositeurs phares de la rumba congolaise.
L'artiste musicien, auteur-compositeur congolais Simon Lutumba Ndomanueno, surnommé Lutumba Simaro Masiya, né le 19 mars 1938 et mort le 30 mars 2019 est un guitariste rythmique, auteur-compositeur congolais et membre du groupe de rumba congolaise TP OK Jazz qui a dominé la scène musicale congolaise des années 1959 aux années 1980.1. Débuts en musique
Simaro est né à Leopoldville (l'actuel Kinshasa). Ses parents angolais ont émigré au Congo Kinshasa, où il a commencé sa carrière musicale. Il s’initie auprès de Kalonji, un guitariste congolais adepte du « zebola » (un possédé), un rythme et une danse des cérémonies d’exorcisme du peuple Nkundu de l’Equateur (Congo-Kinshasa). En 1958, il débute professionnellement à la guitare rythmique dans l’Orchestre Micra Jazz. Un an plus tard, il rejoint le Congo Jazz de Gérard Madiata avec lequel il enregistre « Simarocca » (chez label Esengo), un titre passé inaperçu. Il s’illustrera avec « Muana etike » et « Lisolo ya ndaku », deux compositions teintées de spiritualité.
2. Tout Puissant OK Jazz
Sa popularité naissante arrive bientôt aux oreilles de Franco & l’OK Jazz qu’il rejoint. Le 15 mars 1961, après avoir quitté le groupe Congo Jazz, Simaro Lutumba rejoint Franco Luambo Makiadi dans le groupe Tout Puissant O.K. Jazz (« Orchestre Kinshasa »). Plus tard, Josky Kiambukuta les a rejoints, puis plus tard encore, Ndombe Opetum. Pendant quelque temps, Youlou Mabiala et Madilu System ont joué avec OK Jazz avant de se lancer dans une carrière solo. Pendant de nombreuses années, Simaro a été vice-président du groupe et a dirigé le groupe lors des longs voyages de Franco en Europe dans les années 1980.
Simaro Lutumba y apporte sa touche personnelle : une technique de guitare inspirée du zebola, de la rumba, du jazz et de l’afro cubain et des chansons poétiques, éducatives et pleines de spiritualité. A la sortie de « Okokoma mokristo » (1969) et « Ma Hélé » (1970), deux chansons moralisatrices sur l’amour déçu, la stérilité et le divorce, les talents d’auteur, compositeur, guitariste et chanteur de cet intellectuel reconvertit dans la musique sont enfin reconnus par ses pairs. S‘ensuivent plusieurs morceaux écrits entre 1971 et 1973 : « Motema rétroviseur », « Minuit eleki lezy », « Na lifelo bisengo bizali te », « Cedou », « Masuwa », « Ebale ya Zaïre » ou encore « Où est le sérieux ? ».
Mais il faut attendre 1974 et la composition de « Mabele » (Ntoto) qui veut dire la terre, une rumba mélancolique aux variations jazz interprétée par Sam Mangwana, pour qu’il connaisse une réelle popularité. Cette chanson teintée de spiritualité sur la vie et les limites de l’être humain lui vaut le surnom de « Simaro le poète » ou « Simaro Masiya » (le messie). Mais ce franc succès provoque l’ire de Franco qui décrète, de peur qu’on lui fasse de l’ombre, de jouer uniquement ses propres compositions en concert. Les années de vache maigre de Simaro Lutumba prennent fin en 1984 avec la parution de « Maya », un album rumba / soukouss interprété par le jeune Carlito Lassa qui le remet aussitôt sur le devant de la scène. En 1986, il écrit « Cœur artificiel », un thème à double sens sur les relations humaines chanté en duo par Pépé Kallé et Carlyto Lassa. S’ensuit « Testament ya Bowule » composé avec son mentor Franco.
3. Face à la justice
À la fin des années 1970, il fut emprisonné à la prison de Makala, avec Franco et d'autres musiciens, pour deux chansons jugées obscènes par les autorités. Selon les experts, Lutumba est considéré comme l'un des plus grands poètes, chanteurs et philosophes de la musique congolaise.
4. Président du Tout Puissant OK Jazz
Après la sortie de Sindo na Bruxelles en 1988 et la disparition de Franco survenue le 12 octobre 1989, le groupe décide, d’un commun accord avec la sœur du défunt, Marie Louise Akangana, de verser 30% des recettes aux héritiers qu’elle représente, les 70% restant allant à l’administratif, aux techniciens et aux musiciens. Simaro s'occuperait des musiciens et la famille des avocats, des maisons de disques et des autres intervenants techniques. Sous la présidence de Simaro, le TP OK Jazz réalise, entre 1990 et 1993, plusieurs spectacles (Tanzanie, Kenya, Europe..) et tubes (« Ofela », « Héritage de Franco Luambo », « Diarrhée verbale » « Somo ! », « Mwana ndeke », « Dati pétrole », … Mais des évènements douloureux vont bientôt mettre un terme à cette harmonie.
Marqué par les décès de Maman Annie (femme de Franco) et de plusieurs membres du TP OK Jazz (Djo Mpoyi, Lola Checain, Bosuma Dessouin, Kunsan Hurbain, Mongo et Aimé Kiwakana), les rumeurs l’accusant de main mise sur l’orchestre et les difficultés financières, Simaro Lutumba décide de mettre fin à sa collaboration avec le TP OK Jazz. Lors d’une rencontre avec les autres musiciens au Zénith Bar en décembre 1993, Simaro annonce, devant les caméras de la RTNC (Radio Télévision Nationale Congolaise), qu’il quitte définitivement le groupe. Ainsi s’achève la belle aventure du TP OK Jazz qui aura duré 37 ans.
5. Bana OK
Le 30 janvier 1994, l’orchestre Bana OK (les jeunes de l’Orchestre Kinois) est fondé sous l’impulsion du Poète Simaro Masiya, Josky Kiambukuta et Ndombe Opetum. Formé avec une trentaine de musiciens d'OK Jazz, pour la plupart d'entre eux, Bana OK est composé de Serge Kiambukuta, Shakembo Batangunu, Lokombe Nkalulu, Elba Kuluma, Jerry Dialungana, Makosso Kidundi, Flavien Makabi, Henri Weteto, Henri Bofando, Zinga, Ndilu Kanda, Nsona Bruno. Quant à Madilu System, il n’y restera pas longtemps. Leur premier disque, “Bakitani”, produit par Mose Fan Fan qu’on retrouve à la guitare en compagnie de Papa Noël, est une reconnaissance de l’héritage de Franco et du TP OK Jazz. On y retrouve aussi Rondot Kasongo à la direction de la section cuivre et les vocalistes Malage de Lugendo et Baniel Mbambou (découverte par Franco). Sortent ensuite “Cabinet Molili” puis “Faute ya commerçant”, deux albums rumba odemba / soukouss fidèles au style de Franco.
Après la parution, en 1998, de “Toucher jouer” et “Trahison” (réalisé avec Pépé Kallé), Bana OK fait une tournée européenne (France, Belgique). Mais la malhonnêteté d’un producteur véreux sème la zizanie au sein de l’orchestre délaissé par certains musiciens qui créent le groupe O.K International. Ce désagrément n’entame en rien la volonté de Simaro Lutumba de continuer l’aventure. Ses albums, Ingratitude (sur cette séparation) et Tonnerre Show (1999) laissent entendre de la rumba, du soukouss, voir du ndombolo d’une orchestration originale, avec des riffs de guitare aux couleurs jazz et parfois rock. Ses textes poétiques sur les réalités socio-économico-politiques des Africains lui confèrent le statut de chroniqueur social, de journaliste et d’historien. 2001 est marqué par la sortie d’un Maxi de 4 titres baptisé "Interpellation", l’opus des retrouvailles et de la paix avec ses amis de longue date, Josky Kiambukuta et Ndombe Opetum.
6. Chansons notables
On attribue à Simaro la composition de nombreuses chansons du groupe Tout Puissant OK Jazz, notamment: - Likambo Zi Tu Zoto Esilkata Te, chantée par Michel Boyibanda, Josky Kiambukuta et Sam Mangwana, - Oko Regretter Ngai Mama, chantée par Michel Boyibanda, Josky Kiambukuta, Wuta Mayi et Lola Checain, - Bodutaka, chantée par Sam Mangwana, Michel Boyibanda, Josky Kiambukuta et Lola Chécain, - Mabele (1974), chantée par Sam Mangwana, - Kadima,chantée par Djo Mpoyi, - Eau Benite, chantée par Madilu Système,- Maya (1984), chantée par Carlyto Lassa,-Testament il y a Bowule, chantée par Malage de Lugendo,-Vaccination, chantée par Kiesse Diambu, - Ebale ya Zaire, chantée par Sam Mangwana, - Faute Ya Commercant, chantée par Sam Mangwana, - Cedou, chantée par Sam Mangwana, Michel Boyibanda & Franco, - Bisalela, chantée par Youlou Mabiala, Josky Kiambukuta, Michel Boyibanda et Wuta Mayi, - Mbongo, chantée par Djo Mpoyi, - Salle d'attente, chantée par Ferre Gola, Josky Kiambukuta, M'bilia Bel et Papa Wemba.
Adjuvant KRIBIOS-KAUTA
À suivre